pv. alaina&brookelle _

{ mardi soir. }

Brookelle. Je suis littéralement crevée. Je sors de l'agence, et comme d'habitude, ce sont les mêmes personnes qui me manquent. Ryan, Alaina, Alex, Killee, Matthew. J'ai l'impression d'être coupée du monde, et le pire finalement, c'est de se dire que ça n'est qu'une impression. Je me dirige vers le stationnement des taxis, jusqu'à ce que je m'aperçoit que je n'ai pas ma carte de crédit. Et comptez pas sur moi pour avoir du liquide dans mes poches, j'en ai ja-mais. Décidemment .. Pas le choix, je fais demi-tour, obligée de prendre le metro. Si juste Blair l'apprend, elle va me tuer. « Le metro c'est tellement répugnant. On est trop classes pour le prendre Brookelle, niah niah niah niah niah. » Bref. Blair et ses répliques habituelles sur la classe sociale à laquelle chacun appartient, on l'a connait tous par coeur. Personnelement, j'en deviens folle. Je descends les escaliers du metro, légèrement craintive au fait que je ne connais absolument rien au subway. Si c'est pas être dans la merde, je me demande ce que c'est vraiment d'être dans la merde. Je soupire, tourne en rond, me fais bousculer par les gens pressés et déprimés de leur journée pourrie. J'en ai mal à la tête, resoupire, et finit par me faire bousculer violemment, assez pour en être tombée par terre. Premier reflex, dire un beau « Putain » bien courtois, et deuxième reflex, lever la tête. Là, j'étais sur le cul. Et ce, dans tous les sens du terme.

« Alaina ?! »

C'est bien elle. Elle est devant moi, enfin. Toujours aussi autoritaire, toujours aussi enceinte. Les gens sont vraiment des enculés. Ca se voit quand même; faudrait être aveugle pour ne pas voir qu'il y a une femme enceinte en plein milieu la foule qui pue la transpiration. J'ai juste envie de me relever brutalement, et de crier quelque chose de désobligeant à cette génération honteuse. Mais je ne le fais pas. Je saisis la main d'Alaina, et laisse apparaître un de mes plus beaux sourires. Je la prends dans mes bras, et me fous totalement du reste du monde. A New-York, en comptant notre taff et le temps de libre qu'il nous prend, en un mois, une personne du groupe a une chance sur dix de tomber sur un autre du groupe. Et ça, c'est déprimant. Voire pire. Je me décolle d'Alaina, que je regarde attentivement. Elle n'avait pas changé; quoiqu'elle était encore plus belle que la dernière fois qu'elles s'étaient vues, et ses cheveux teints en brun lui allait réellement bien.

« Alors, comment tu vas ma puce ? »

Elle me demande comment je vais. Je lui réponds que je vais assez bien, surtout après ces retrouvailles entre elle et moi. Je lui réponds qu'elle aussi, elle m'a manqué, plus que tout, et que désormais, elle ne me quittera plus jamais. J'ai tellement de choses à lui raconter. Sur le moment, je me demande comment va le bébé. Sait-elle de quel sexe est-il désormais? Ryan le sait-il aussi ? Un gros stop s'afficha dans mon cerveau. Je commence à saturer. J'en ai marre de toute cette pression. Faudrait peut-être que je songe à une semaine de congé. Et le mariage me tracasse. Y a des fois, tellement Ryan et moi on se voit rarement, je me demande s'il m'aime encore. C'est absurde comme question, mais on sait jamais. D'autant plus quand on est conscient du fait que y a deux fois mieux que ma propre personne. Ma propre personne que je plainderais fortement si je n'étais pas moi. Soit. Je commence à avancer, le plus tranquillement possible, aux côtés d'Alaina, m'assurant qu'elle n'avait rien, et qu'elle n'avait pas de difficultés pour marcher. Manquerait plus qu'il lui arrive quelque chose.

« Et ce bébé ? Il va bien ? »

Il va bien. L'enfant est de sexe masculin, et Ryan n'en est pas au courant. Ce dernier ne répond plus aux appels d'Alaina, ni à ceux que je n'émets pas sachant très bien qu'il sera trop occupé pour y répondre. La dernière que l'on s'est vu tout les deux, c'était il y a un mois et plus. J'en lèverai les yeux déséspérées si je n'étais pas avec Alaina.

J'ai dix-huit ans, et je suis mannequin. Il a vingt-deux ans, et il est le guitariste de Panic! At The Disco. On la refait. J'ai dix-huit ans, et je suis une vulgaire mannequin n'ayant même pas besoin de taffer pour avoir du fric vu le niveau social auquel j'appartiens depuis ma satané naissance. Lui a vingt-deux ans, et il est le guitariste de Panic! At The Disco. On est tous conscient qu'il y a quelque chose qui cloche. Et dire qu'on est fiancé et qu'un mariage était prévu. A cette heure-ci, je me demande s'il tient encore la route ce mariage. Le temps me prend, lui le tire.

J'en peux plus. Hors de question de craquer devant Alaina. Je me l'interdis, et de toutes manières, je ne le ferais pas. Seul problème: elle me connait. Elle grillera facilement qu'un truc ne va pas. En outre, les gens autour de moi, proches ou pas, m'ont toujours dit que je n'avais pas le droit de me plaindre, et que j'avais tout pour plaire. Ces gens-là, je l'ai emmerde. Il ne suffit pas d'être issue d'une famille plus-que-bien-aisée pour être heureuse chaque jour que Dieu créé. Et ça, c'est ce que ces cons ne comprennent pas. Soit. Je me ressaissis violemment, et attends le train suivant sur le quai.

« T'en vouloir d'être partie ? On t'en veux tous un peu, t'es partie, un enfant dans le ventre, en nous laissant plus-qu'inquiets. Mais on t'en veux jamais longtemps quand il s'agit de toi ^^ . Et moi, avec Ryan, j'aimerais ne s'rait-ce te répondre que ça va, ou à la limite, que ça va pas, mais je peux te répondre ni l'un ni l'autre .. »

Alaina n'était pas idiote; loin de là. Elle avait compris. Très bien compris. Une fois de plus: Moi, c'est Brookelle. J'ai dix-neuf ans, et à Londres, je serais déjà majeure, ce qui n'est pas le cas ici. Moi, j'aurais pû être comme toutes ces autres filles stupides de Londres appartenant à la même classe sociale que moi portant des manteaux de fourrure & des montres Cartier, qui pleurent pour un oui ou pour un non, qui simulent les orgasmes, qui sortent à quatorze ans, tapent à quinze, sucent à seize, qui a dix-sept se font dépuceler par le fils de quelqu'un et subissent leur première chirurgie tel que la liposucion, ou la pose d'implants mamaires. Mais heureusement pour moi, j'ai pas fini comme ça - et je n'ai d'ailleurs jamais commencé. Le rapport? Il n'y en a pas. J'aime me rappeler combien ma vie est pathétique et limite inactive par moment. Je n'irais pas jusque dire que je suis suicidaire, c'est un bien grand mot ne me qualifiant guerre. En réalité, je vis à travers les histoires d'amour des autres, à défaut d'en avoir une. Une qui en fait, existe, mais qui se cache, et qui serait certainement prêt à se tuer. Je me demande ce que pense Alaina de moi. J'ai été une salope. Une belle salope, faute d'avoir eu une soit-disante meilleure amie qui vous a fait la plus grosse crasse du monde. Si je suis tombée amoureuse de Ryan ce beau jour où il pleuvait comme une vache qui pisse, ça n'est pas par vengeance. Sans quoi je ne me sentirais pas aussi dégueulasse que j'en ai l'impression d'être. Alaina était avec Ryan; tout ce passait pour le mieux entre eux. De mon côté, j'étais enceinte d'un mec qui ne me voulait certainement que pour le cul, et j'ai dû tout gâcher. Peut-être qu'aujourd'hui, si j'avais gardé mes sentiments et ma souffrance pour moi, Alaina serait enceinte, toujours de Ryan, et là, ça poserait aucun problème que l'enfant soit de Ryan; car en l'occurence, ils seraient encore ensemble à vivre le parfait grand amour, le plus loin possible de moi et des problèmes que je procure. Je sers à rien, et au moins, j'en suis consciente: seule.

« Je te comprends .. Mais je suis là, et je ferai absolument tout pour que tu sois le moins perdue possible. »

{ alternative }

« Qu'est-ce qui se passe? Absolument rien, nan nan, rien. Il paraît que l'homme que j'aime et moi-même allions nous marier. J'ai bien dis il paraît ! T'en sais peut-être plus que moi non ? »

{ réalité }

« Nan .. rien, t'en fais pas, je veux pas t'ennuyer avec mes histoires, enfin voilà, tu me connais, ce genre de petits soucis, trop fatiguée à cause du travail, etc quoi. T'inquiètes pas pour moi ma belle. Mais .. Hun ? Loin d'être la meilleure amie parfaite? Alaina, t'es tout ce dont une personne peut rêver! Je t'échangerais pour rien au monde, jamais j'aurais pû rêver mieux en ce qui concerne avoir une meilleure amie. T'es toujours là pour moi, et je sais que tu le seras toujours. »

J'aquièce sa proposition. De toutes façons, même si j'avais quelque chose de prévu, je l'aurais annulé. Attendez, je viens de retrouver mon essentielle, allez pas croire que c'est le moment pour aller remplir des papiers en tout genre ...

Le train arrive enfin. Les portes s'ouvrent. On entre et s'asseoit là où il y a de la place. Elle me remercie pour tout, et se rend apparement compte de la chance - je dirais plutôt que c'est de la malchance - qu'elle a de m'avoir. J'aquièce d'un de mes plus beaux sourire que j'adore lui adresser qui veut tout dire. Que je l'aime et que sans elle, je ne suis plus rien. Putain ce qu'elle m'a manqué. Mais maintenant elle est là.

Une question me tracasse depuis le début de sa grossesse. Avait-elle eu envie d'avorter de plein coeur? Je me souviens, moi. Je ne savais pas quoi faire. Et au lieu d'en parler avec l'un d'entre eux, j'ai préféré fermer ma gueule et de me débrouiller. J'ai préféré assumer comme une gamine de dix-neuf ans. C'était horrible. Tellement que je n'arrivais plus à me regarder dans une glace. Les horreurs s'enchaînaient les une derrière les autres. Cet enfant, puis Ryan, puis Matthew qui avait apparût comme par magie, puis tellement d'autres trucs.

Je la ferme. C'est elle qui ment. Je suis loin d'être la meilleure. Si elle ne peut pas me pardonner pour ce que je lui ai fais dans le passé - car oui, ce genre de chose ne s'oublie pas - imaginons trente secondes comment je me sens, et comment je dois me sentir. Mal. Très mal. Voire dégueulasse.

J'ai mal à la gorge. Comme quand on essaie de retenir ses larmes les plus douloureuses; car c'était bien ce que je faisais. Je prends la main d'Alaina, et la serre gentillement. Je la regarde dans les yeux et laisse cette fois-ci le regard parler. Je n'ai pas besoin de dire quoique ce soit, car je sais qu'elle me comprend. Je veux pas parler ici, dans ce metro répugnant. Je ne sais pas où elle descend, mais il me semble que moi, je descends à la prochaine. Du moins, j'espère.

« Apparemment, je descends la première. Tu viens chez moi ? Y a personne. Enfin .. Ryan n'est pas là ... dis-je en fuyant son regard. C'est un peu le bordel, mais bon. »

Un peu que c'était le bordel. Je passe plus de temps à l'extérieur que chez moi. Chez moi où le vide se fait sentir d'un mal atroce. Un vide qui avant était là. Un vide qui avant s'appelait Ryan ...

« Bah viens chez moi, je te montrerai dans quoi ta petite Brookelle vis ^^ . »

Elle vit dans un appartemment à Dieu-sait-combien de balles, dans lequel elle n'y est pratiquement jamais. Un appartemment complétement vide une fois de plus. Dans lequel les rideaux ne sont jamais ouverts, tout simplement parce que l'obscurité égale parfaitement le silence et la tristesse qui se fait lourdement sentir dans n'importe quelle pièce.

On descend du train un sourire aux lèvres; comme quand on est content de retrouver quelqu'un - car c'était le cas. J'étais plus-que-contente de la retrouver. De retrouver la personne sans qui vous n'êtes plus rien. Je me demande s'elle a revue Matthew depuis tout ce temps où personne n'a l'air d'avoir vu quiquonque de la bande. Pour moi, la question ne se pose même pas. Quoique j'ai vu Killee, avec qui je me suis violemment fâchée, puis Alex, mais simplement de vue, puis Ryan, mais par pur hasard. Autrement dit, ça compte pas.

On arrive dans la rue, où on crève de froid. Il faut apparement marcher quelques mètres avant d'arriver à mon immeuble. On commence à marcher, plus ou moins rapidement, pressées d'être tranquillement au chaud. On arrive. Je sors mes clés, ouvre la porte et laisse Alaina passer devant moi. Elle semble être impressionée par l'immense hall dans lequel on se trouve. Les lumières s'allument automatiquement et j'appele l'ascenseur. En attendant, je me regarde dans la grande glace murale qui se trouve à ma gauche. Je me trouve grosse, moche et conne. Mais ça me passera. L'ascenseur arrive, on y rentre. Même l'ascenseur est immense. Ca sert strictement à rien. Troisième étage. J'ouvre la porte de mon appartement, commence par allumer les lumières, rentre, et crie:

« Entre et fais comme chez toi. Tu veux quelque chose à boire miss ? »

Qu'est-ce qui s'est passé? Plus ou moins rien. Mais j'allais pas lui répondre ça. Sur la grande table en verre de la salle à manger, il y avait un rail de coke que je n'ai pas pû me faire la veille tellement j'étais défoncée. Le sachet était à côté. J'espère qu'Alaina ne remarquera rien. Puis j'en suis pas dépendante. Quoiqu'il en soit, je prends les affaires d'Alaina et les mets dans la penderie. Je reviens, et m'asseois en face d'elle, sur un fauteuil sur lequel je n'ai pratiquement jamais posé le cul. C'est déprimant de se répéter encore et toujours la même chose. Mais on ne peut pas vraiment dire que je vis avec Ryan. C'est pas contre lui, au contraire. Sa carrière prend de l'ampleur, de même pour moi, pourquoi j'irai arrêter quoique ce soit ? Il n'empêche que ça m'emmerde.

« Uhm .. J'ai revu ma soeur. Mais .. ça c'est très mal terminé. En gros, on s'parle plus du tout, et je lui ai balancé des belles saloperies à la gueule. Mais bon. Sinon, j'ai revu Ryan .. y a un peu plus, enfin beaucoup plus d'un mois. Et Matthew, avant que je prenne mon avion pour New-York, on avait prit un café ensemble. Depuis, je l'ai pas revu, et j'ai aucunes nouvelles. Mais il doit pas être très loin. Euhh .. Pourquoi ? Me dis pas que t'as pas de nouvelles de lui non plus ? »

Là, je m'inquiètais. Il a pas pû se casser comme un lâche sans même prendre la peine de dire au revoir à qui qui ce soit; en particulier Alaina. D'autant plus que la dernière que je l'ai vu, il avait l'air de ne pas être au courant une seconde de la grossesse soudaine d'Alaina. Soudaine, c'est le cas de le dire. Personne ne s'y attendait. D'ailleurs, j'essaies de me rappeler du jour où j'en ais été au courant. Mais je n'y arrive pas.